Bon, je vous l’accorde, le suspense n’était pas insoutenable et vous avez survécu à l’absence de « suite et fin » de cette aventure professionnelle que j’ai vécue et dont je vous ai livré les deux premiers volets. Voici ce qui s’est passé ensuite…
Si vous n’aviez pas lu les deux précédents articles (il est encore temps… Cette nuit, c’était ma première fois 1 et Cette nuit c’était ma première fois 2) ils révélaient comment j’étais entré dans ce cabinet d’outplacement, comment j’étais passé de consultant senior à manager avec la difficulté certaine de manager d’anciens collègues…
Le moment est enfin venu de vous révéler… comment j’en suis sorti !
Dans l’entreprise, on a toujours des alliés et toujours des détracteurs… Parfois, quelques détracteurs ont plus de pouvoir de nuisance qu’un nombre conséquent d’alliés.
Je jouissais au sein de mon équipe d’une majorité d’appuis. Les consultants que j’avais moi-même recrutés, probablement dans un sentiment de reconnaissance classique, m’étaient particulièrement favorables et dévoués ; ce n’était pas forcément le cas de ceux qui étaient précédemment mes collègues et dont j’étais devenu le manager !
Les consultants sont un peu comme les comédiens. Des professionnels sensibles, voire susceptibles, qu’on ne peut pas manager comme d’autres collaborateurs…
Ils sont tous habités par un désir très ancré d’aider l’Autre, soucieux de se rendre utile et de placer leur activité constamment au cœur de l’humain.
Je fus surpris au moment où je recevais les candidats et candidates pour constituer mon équipe de leur fragilité et des difficultés qu’ils rencontraient dans ces entretiens de sélection. Peut-être qu’ils se sentaient eux-mêmes des « arroseurs arrosés… » Ils étaient tous spécialisés dans l’accompagnement de personnes en repositionnement professionnel et à ce titre étaient censés être incollables sur toutes les situations de retour à l’emploi et se trouvaient paradoxalement, à leur tour, dans la position des candidats qu’ils conseillaient.
J’avoue avoir été particulièrement exigeant vis-à-vis des consultants candidats à l’embauche durant ces entretiens Je leur posai des questions types, des questions « bateau », certains les qualifieraient de « questions pièges ».
Il me semblait évident que des consultants expérimentés ayant déjà conseillé des candidats sur la conduite à tenir face à ce type de question ne devraient pas être en difficulté. La réalité fut toute autre.
Je me souviens encore de cette consultante à qui je demandais de me livrer un de ses défauts et qui sécha lamentablement sur la question. Elle hésitait, visiblement déstabilisée. « Eh bien… heu… un défaut ? c’est bien ça ? » (J’opinai en signe de confirmation). « Un défaut… un défaut… heu… Un défaut… C’est pas facile comme question… Un défaut… Je dois bien en avoir, comme tout le monde… » (ces hésitations étaient interminables…) « Franchement, je vois pas… Peut-être… heu… Ah oui… Mon ancien manager me disait toujours que j’étais caractérielle et ingérable… ».
Caractérielle et ingérable. Je vous laisse deviner ma surprise. Elle n’avait pas préparé la question et pourtant cela fait partie du métier de tout consultant en outplacement d’aborder ces sujets avec les candidats accompagnés… Et pour couronner le tout, elle finissait par me livrer un défaut énorme et il faut bien le dire, ne donnant guère envie d’aller plus loin.
Lorsqu’on confie des professionnels privés d’emploi, fragilisés par ce tournant dans leur carrière et dans leur vie, on peut difficilement le faire à d’autres professionnels qui eux non plus ne sauraient pas comment procéder dans la même situation !
Je le disais, les consultants sont des gens sensibles parfois et certaines situations peuvent encore accentuer cette sensibilité.
Ce fut le cas dans la suite des événements. Ces consultants étaient pour la plupart en mission, en CDD d’assez longue durée, susceptible de couvrir leurs accompagnements conformément aux accords mis en place entre le cabinet d’outplacement et l’entreprise cliente.
Mais lorsqu’il ne restait plus qu’un mois et que leur contrat était proche de s’achever, nombreux furent ceux qui se posaient légitimement des questions sur la suite.
Le département dans lequel nous travaillions était en plein essor. On entendait parler de nouveaux contrats, de nouvelles missions… On le savait, le cabinet allait avoir besoin de compétences opérationnelles. Mais ce qu’on ne savait pas, c’est qui serait maintenu en poste, propulsé éventuellement en CDI et qui verrait son contrat à durée déterminée sans suite.
La décision incombait au directeur du département. Moi j’étais leur N+1, lui leur N+2.
A ce moment-là, beaucoup de consultants et de consultantes se confièrent à moi. Ils me faisaient part de leurs angoisses, de la difficulté à continuer à travailler sereinement sans savoir à quelle sauce ils allaient être mangés quelques semaines plus tard.
A force d’entendre leurs sollicitations, leurs interrogations et leurs angoisses, je décidai d’en parler à mon patron, leur N+2.
Cet homme m’avait toujours fait confiance. Mieux que ça, à chaque fois qu’il parlait de moi, c’était en termes dithyrambiques. C’est d’ailleurs lui qui m’avait choisi parmi tous les consultants pour cette ascension professionnelle fulgurante.
Je lui expliquais la situation : leurs doutes, leurs craintes, leurs préoccupations.
Il afficha une véritable surprise. Il s’étonnait que personne ne soit venu ouvertement lui en parler. Lui s’étonnait, pas moi. Il était d’un abord un peu froid, parfois cassant et je pouvais tout à fait comprendre que personne n’osait réclamer quoi que ce soit à ce manager intimidant, même avec la meilleure motivation du monde pour rester dans le cabinet.
Il me demanda à plusieurs reprises si j’étais sûr de ce que j’avançais. Je confirmai. Il s’étonna encore de ne rien avoir perçu par lui-même. Je le sentais presque vexé d’être passé à côté des préoccupations de ces collaborateurs. En même temps, j’étais leur manager et il était assez logique qu’ils s’adressent en premier lieu à moi. Mon manager ne semblait pas très convaincu par cette évidence.
Il clôturât l’entretien en me disant qu’il allait communiquer auprès d’eux mais qu’il préférait dans un premier temps s’entretenir avec un certain nombre d’entre eux, individuellement.
Ce qu’il fit dans les jours qui suivirent.
Dix jours après, je reçu une convocation pour un entretien préalable à licenciement !
Le jour de l’entretien, contre toute attente, mon manager m’accueillit presque chaleureusement.
Il me regarda d’un oeil perçant et me dit qu’il avait parlé avec plus de la moitié de l’équipe et il m’assura que personne ne semblait inquiet. Les consultants (qu’il prenait le soin de citer nominativement) ne reconnaissaient pas m’avoir parlé. Ils ne se sentaient pas concernés par les propos que j’avais tenus. En un mot, ceux-là même qui avaient sollicité mon écoute, à maintes reprises, aujourd’hui, semblaient tenir un tout autre discours.
Mon manager ne tarda pas à me livrer ses conclusions. Soit je lui avais menti, je lui avais raconté n’importe quoi, soit c’était les consultants qui avaient retourné leur veste.
Je tentais une hypothèse qui me semblait assez logique. Impressionnés par lui, ne se sentant pas en confiance, ils n’avaient pas osé lui réclamer en face quoique ce soit et avaient préféré le « brosser dans le sens du poil ».
Il arriva à sa propre conclusion finale qu’il formula ainsi : « donc soit c’est toi qui mens, soit c’est moi qui suis un mauvais manager puisque je n’arrive pas à instaurer un climat de confiance suffisant pour que les consultants se livrent à moi. Quelle est la bonne hypothèse, Frédéric ? »
Il me mit la pression en me disant que rien n’était définitif encore, que cette lettre d’entretien préalable, il ne tenait qu’à nous de la déchirer et de continuer comme avant. Mais pour cela, il fallait que j’avoue. Que j’avoue… que j’avais menti. C’était la seule solution qu’il daignait envisager.
Je le regardai dans les yeux et lui répondis, avec un léger sourire quelque peu effronté : « je n’ai pas l’habitude de mentir. » (ce qui est vrai !)
Il me répondit qu’il allait en tirer les conséquences.
Les conséquences ne tardèrent pas à arriver. En recommandé. Dans ma boite aux lettres.
Une semaine plus tard, je recevais ma lettre de licenciement.
Et comble du comble, la consultante qui s’était montrée plutôt jalouse vis-à-vis de moi et qui n’avait pas apprécié que je tranche en sa défaveur (voir épisode Numéro 2 !) fut la première à venir me voir, à se scandaliser de ce qui venait de m’arriver et à s’empresser de me communiquer les coordonnées de son avocat !
Les détracteurs d’hier sont parfois les alliés de demain. Et réciproquement!
Ne partez pas déjà!
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